Siria, Come vive un ex detenuto

La vita nella cella di una prigione con gli interrogatori, la tortura, la paura, la solitudine, ma anche la solidarietà tra compagni, il coraggio e la dignità, è stata spesso oggetto dei racconti di ex detenuti politici.

Spesso questi ricordi sono stati raccolti per iscritto e condivisi così anche oltre la cerchia di amici e conoscenti.

E invece sembra che quello che accade ai detenuti politici una volta “fuori” dal carcere, la vita di un “ex” prigioniero che prova a reintegrarsi nella società e a riabilitare la propria immagine sociale non desti alcun interesse.

Yassin al Haj Saleh ha provato a riempire questo vuoto e a raccontare il “post-prigione”. Lui stesso è un ex detenuto: ha trascorso più di quindici anni nelle carceri del regime siriano, prima ad Aleppo e poi nella tristemente famosa prigione di Palmira, per la sua militanza in un gruppo di ispirazione comunista.

Il suo lungo articolo che proporremo in diverse puntate si riferisce direttamente alla sua esperienza in carcere in Siria, ma potrebbe applicarsi ugualmente a qualunque altro Paese governato da un potere che adopera la violenza per tentare di schiacciare e disumanizzare i cittadini.

In questa prima parte Yassin al Haj Saleh analizza i diversi fattori della reclusione che andranno a influenzare la vita post-carcere, quali, ad esempio, la durata della detenzione, il modo in cui si è vissuto il periodo in prigione e quanto le torture e le pressioni subite abbiano segnato l’individuo.

(di Yassin al Haj Saleh*). Un certain nombre de facteurs déterminent la vie post-carcérale. Le plus important est la manière dont le prisonnier à vécu son temps de prison, c’est-à-dire la manière dont il a réagi aux interrogatoires et aux tortures de routine qui les accompagnent.

Ainsi, le prisonnier qui « craque » endure difficilement la prison tandis que le « traître » traîne sa culpabilité comme un boulet. Autres facteurs pesant sur la vie en prison : l’âge du prisonnier, sa condition sociale et son niveau de revenu. Il est vrai qu’un jeune homme supporte mieux la prison qu’un homme âgé, de même qu’un célibataire ou un homme sans enfant, en bonne santé et ayant des revenus corrects.

Les liens de solidarité qui se nouent en prison allègent les problèmes matériels. La manière dont est équipée la prison permet aux prisonniers d’apprivoiser le temps et de s’organiser. La présence de livres, d’ustensiles de cuisine, les visites régulières, aident le prisonnier à chasser le temps incommensurable de la prison et à rapprocher son rythme de vie de celui de ses proches et de la vie à l’extérieur.

En revanche, les conditions de vie des islamistes, notamment dans la prison de Palmyre, étaient très dures parce qu’on y manquait de tout ce qui aide à supporter la prison et que la torture au quotidien pouvait parfois durer vingt ans. Alors que la prison de Palmyre produisait une rupture radicale entre les deux vies, les prisons d’Alep, de ‘Adra et de Sednayya, proches de Damas, permettaient au prisonnier d’établir certains liens entre sa vie passée et présente.

Par ailleurs, la durée d’incarcération était un facteur déterminant de la manière dont allait se dérouler la vie à l’intérieur, puis à l’extérieur de la prison. Il semble que plus l’incarcération durait, plus elle devenait difficile mais ce n’était pas toujours le cas. La première étape est toujours dure, elle peut durer un ou deux ans, voire plus, selon l’âge du prisonnier (les hommes mariés et les pères endurent toujours plus de difficultés), son caractère, les conditions de vie, y compris les visites régulières, la présence de prisonniers qui l’ont précédé.

Nous étions ainsi les « fondateurs » de l’aile politique de la prison de Musalamiyya, à Alep, et nous avons eu à résoudre un grand nombre de problèmes et de difficultés liés par exemple à la fourniture de vaisselle, du réchaud à gaz, des matelas sur lesquels nous dormions et de dizaines d’autres détails qui nous ont occupés pendant plus de quatre ans avant d’être tous résolus. Ceux qui sont arrivés après nous, notamment dans la seconde moitié des années 1980, ont connu des conditions plus favorables qui les mettaient en présence de défis moindre.

Ensuite, le prisonnier fait de la prison un lieu de résidence et tente de « s’acclimater » proportionnellement à la durée de l’incarcération. Cela est surtout vrai pour les jeunes prisonniers célibataires, au revenu correct et qui peuvent entamer un nouveau chapitre de vie en prison. Personnellement, je me suis « acclimaté » au mieux en prison après le décès de ma mère en 1990 et surtout après la libération de mes deux frères, fin 1991. Mais rien de cela n’était possible dans la prison de Palmyre où sévissaient la torture et la peur au quotidien.

Les conditions de libération du prisonnier sont un autre facteur déterminant. Ainsi, l’impact psychologique et moral n’est pas le même selon que l’on sort après avoir engagé sa signature en vue de collaborer avec les services de renseignement ou non, selon que l’on est assigné à rendre régulièrement visite aux services en question ou non. La plupart des prisonniers de gauche sont exemptés de visites, même s’ils se sont engagés à collaborer. Alors que les islamistes sont contraints d’avaler la pilule amère : ils doivent se rendre au poste une fois par mois, ou tous les deux ou trois mois. Il n’y a pas de règle fixe, ils sont à la merci des services qui se comportent de manière arbitraire.

L’environnement général dans lequel est plongé le prisonnier après l’incarcération est tout aussi déterminant. Les prisonniers communistes, libérés après 2000, ont trouvé une société moins inquiète, des services de renseignement moins omnipotents et leurs anciens camarades occupaient des fonctions dans le domaine public. Tout cela était de nature à remonter leur moral et à leur permettre de se réintégrer plus rapidement, grâce au réseau de relations et d’entraide qui favorisait leur insertion. Les islamistes ont profité à leur tour de ce climat général même si les obstacles à leur intégration dans la vie publique étaient les mêmes que ceux qui régnaient vers la fin des années 1970.

D’autres facteurs, comme les conditions de vie de la famille du prisonnier et les liens qui unissent les membres, ont leur importance au cours des premiers mois qui sont les plus durs de la vie post-carcérale. Il va sans dire que les prisonniers politiques syriens n’ont jamais reçu de soutien matériel durant leur incarcération ou après, ni de la part du pouvoir qui continue à les considérer comme des ennemis, ni de la part des organisations internationales. Des milliers de familles ont payé le prix fort, sur le plan matériel ou sécuritaire, durant l’absence de leurs fils ou du chef de famille.

En effet, elles étaient suspectes aux yeux du pouvoir, furent exposées à diverses pressions, allant des convocations répétées à l’interdiction des autorisations de travail dans les administrations publiques, notamment dans l’enseignement. L’État étant l’employeur principal, cela revient à dire que beaucoup d’entre eux étaient voués au chômage. Ce sont les familles seules qui supportent le poids de la réinsertion du prisonnier, sur le plan physique, moral, social et professionnel. C’est une tâche dure, impossible parfois, quand le prisonnier souffre d’une maladie incurable, physiquement ou moralement.

La pression qu’exerce la famille syrienne sur l’ancien prisonnier ou sur l’un ou l’autre de ses membres pour les empêcher de s’engager dans une activité publique traduit les pressions qu’elle-même a subies durant l’absence du prisonnier. Il est vrai aussi que c’est elle qui se charge seule de les accueillir et de les supporter moralement, ce qu’elle fait d’ailleurs souvent avec succès. En contrepartie, le prix à payer est d’interdire à ses membres de faire de la politique. Renfermée sur elle-même, elle interne ses membres comme on isolait jadis les pestiférés.

Ainsi, c’est en brûlant le paysage social syrien pour qu’aucune herbe ne repousse, pour qu’aucun parti politique ou aucune organisation sociale indépendante ne voie le jour, que le régime de Hafez al-Assad a réussi à hypothéquer la vie politique et à en exclure les Syriens. C’est cet espace public habité par la peur et dont les habitants du pays ont été chassés que découvrent les prisonniers politiques syriens à leur sortie.

(continua…)

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* Il brano è tratto da: «L’univers des anciens prisonniers politiques en Syrie», Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée (dicembre 2006).